Soyouz | Communications audio

Le rôle du système de communication audio SRS (Система Радиосвязи) est de permettre les communications dans les deux sens entre l'équipage du vaisseau Soyouz et la Terre.

1. Le système de première génération Zaria

A l'origine, le vaisseau Soyouz était destiné aux vols en orbite circumlunaire. Ce projet, baptisé alors 1L, a été approuvé le 16 avril 1962, et un système radio capable de fonctionner depuis la Lune est donc développé.

Mais une réorientation de la politique spatiale soviétique vient par la suite annuler tout le projet, car le vaisseau LK-1 est préféré pour les vols lunaires. Un nouveau rôle est trouvé pour le Soyouz : réaliser des vols en orbite terrestre pour défricher les techniques de rendez-vous, d'amarrage et de sorties dans l'Espace. Suite au décret du 18 août 1965, le vaisseau est rebaptisé 7K-OK (11F615), et le système radio doit être complètement revu.

Le nouveau système de communications audio est baptisé Zaria. Son développement est confié à l'institut NII-695, basé à Moscou et baptisé aujourd'hui MNIIRS, sous la direction de Youri BYKOV. C'est déjà cet ingénieur qui avait supervisé le projet éponyme de système de communications pour le vaisseau Vostok.

Fig. 1.1 : Youri Sergueïevitch BYKOV.
Crédit : Boris TCHERTOK.

Les communications entre Soyouz et la Terre se feront par l'intermédiaire de stations relais. Comme le vaisseau ne sera pas en permanence dans la zone de visibilité de ces stations, il sera équipé d'un enregistreur appelé Mir-3, qui sauvegardera les données télémétriques et les communications audio. Ces données pourront être envoyées au sol dès que le vaisseau sera à nouveau visible des stations relais. Le Mir-3 est développé au NII-88 [1].

Le système Zaria fonctionne en Très Haute Fréquence (VHF) ou en Haute Fréquence (HF), suivant le mode utilisé. Il permet à l'équipage de communiquer en audio aussi bien pendant le vol en orbite que pendant la descente. De plus, après l'atterrissage du Compartiment de Descente (SA), il permet d'envoyer un signal de repérage pour les équipes de récupération [2].

Pour les communications depuis l'orbite, le système Zaria dispose d'antennes spécifiques, dont le nombre et l'emplacement sont inconnus. Pendant la phase d'atterrissage, les communications sont rendues possibles par trois petites antennes qui traversent le bouclier thermique.

Fig. 1.2 : Disposition des trois antennes et du transmetteur du système Zaria
sur le Compartiment de Descente du vaisseau Soyouz-37.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

Fig. 1.3 : L'une des trois antennes du système Zaria
à l'arrière du Compartiment de Descente du vaisseau Soyouz-37.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

Afin de faciliter la récupération de l'équipage par les équipes de secours, le Compartiment de Descente est également équipé d'un transmetteur et d'une balise lumineuse.

Fig. 1.4 : La balise lumineuse à l'arrière du
Compartiment de Descente du vaisseau Soyouz-37.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

A l'avant du vaisseau, une antenne est déployée juste après l'atterrissage. Elle est elle aussi accompagnée d'une balise lumineuse pour faciliter le repérage par les équipes de récupération.

Fig. 1.5 : Vue de l'antenne latérale (en position repliée) du vaisseau Soyouz-37.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

2. Le système Rassviett pour le Soyouz TM

A partir de 1980, une nouvelle version du vaisseau Soyouz commence à être développée. Baptisée Soyouz TM (11F732A51), elle est spécifiquement adaptée pour effectuer les liaisons entre la Terre et la nouvelle station orbitale Mir.

L'une des modifications du Soyouz TM est le nouveau système de communication audio Rassviett, développé par le MNIIRS.

2.1. Modes de fonctionnement

En fonctionnement normal, durant le vol orbital, les communications se font en VHF sur un canal duplex (les communications montantes et descendantes sont sur des fréquences différentes).

En cas de défaillance du système duplex, l'équipage peut communiquer avec un canal de secours, simplex cette fois (communications montantes et descendantes sur la même fréquence) mais toujours en VHF. Pour parler sur ce canal de secours, les cosmonautes doivent appuyer sur un bouton situé sur une sorte de joystick devant leur couchette Kazbek-U.

Fig. 2.1 : Le joystick devant le siège d'un cosmonaute.
Musée de la NPP Zvezda. Crédit : Nicolas PILLET.

En cas de défaillance des deux systèmes VHF, l'équipage dispose encore d'un canal en HF. Dans ce mode de fonctionnement, il est également nécessaire d'appuyer sur le bouton du joystick pour pouvoir parler.

Si le système HF est lui aussi indisponible, les cosmonautes peuvent utiliser le système de télécommande Kvant-V comme moyen de communication audio. En dernier recours, il est possible de configurer le système de télévision Kliost-M pour communiquer, mais cela nécessite de reconfigurer plusieurs connecteurs dans le Compartiment de Vie (BO).

2.2. Transmetteurs

Le système Rassviett du vaisseau Soyouz TM comprend plusieurs équipements redondants pour les communications audio :

Nom Nombre Type Bande de fréquence Fréquence
UKVPRD 2 émetteur-récepteur VHF 121,5MHz
UKVPRMd 2 récepteur VHF 130,167MHz
UKVPRMs 2 récepteur VHF 130,167MHz
2 balise VHF 121,5MHz
KVPRD 2 émetteur-récepteur HF 3,864MHz/18,060MHz
KVPRM 3 récepteur HF 3,864MHz/18,060MHz

Ces différents matériels sont reliés à des antennes VHF ou HF, qui sont détaillées plus bas. En ultime secours, l'équipage peut communiquer avec l'émetteur d'urgence R-855A-1, qui dispose de sa propre antenne.

2.3. Antennes

Pendant le lancement, les communications passent par une antenne VHF située sur le troisième étage (Bloc I) du lanceur Soyouz. Les transmetteurs VHF du vaisseau sont reliés à cette antenne. En revanche, les transmissions en HF ne sont pas possibles lors de cette phase, faute d'antenne.

Pour les communications depuis l'orbite, le Soyouz TM dispose d'une antenne VHF (ABM-272) située à l'arrière du vaisseau.

Fig. 2.2 : L'antenne ABM-272 du vaisseau Soyouz TM-26, 29 janvier 1998.
Crédit : NASA.

Pour les communications de secours (en HF), le Soyouz TM a deux antennes (ABM-275 et ABM-276), situées aux extrémités de chacune des deux ailes solaires. La structure des ailes est utilisée comme antenne.

Fig. 2.3 : L'extrémité de l'une des ailes solaires de Soyouz TM-27, 8 juin 1998.
Crédit : NASA.

Lors de la phase de descente, les communications VHF sont possibles au moyen de l'antenne ABM-273, située sur l'écoutille du Compartiment de Descente (SA). Les communications HF ne sont possibles qu'une fois le parachute déployé, car l'antenne par laquelle elles passent est fixée à la suspente. Il s'agit de l'antenne ABM-264 pour le parachute primaire (OSP), et de la ABM-265 pour le parachute secondaire (ZSP).

Après l'atterrissage, le système Rassviett permet aux équipes de récupération de repérer le vaisseau. Il envoie pour cela un signal de repérage en VHF grâce à l'antenne ABM-279, située dans un petit compartiment sur le flanc du vaisseau. Durant le vol spatial, elle est protégée par un capot. Après l'atterrissage, le capot est largué par des boulons pyrotechniques et l'antenne se déploie. Une balise lumineuse SIB-2 est placée à côté de l'antenne.

Fig. 2.4 : Vue de l'antenne ABM-279 sur le SA de Soyouz TM-7.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

En plus de la ABM-279, le Compartiment de Descente dispose de trois autres antennes VHF, appelées ABM-274, situées à l'arrière. Suivant la position du vaisseau sur le sol, les capots de protection de l'une ou l'autre de ces antennes sont éjectés.

Fig. 2.5 : Vue des antennes ABM-274 sur le SA de Soyouz TM-7.
Musée Mémorial de la Cosmonautique. Crédit : Nicolas PILLET.

Fig. 2.6 : Le vaisseau Soyouz TM-3 après son atterrissage, le 29 décembre 1987.
On voit bien que seules deux des trois antennes ABM-274 se sont déployées.
Crédit : Videocosmos.

Le déploiement des antennes ABM-279 et ABM-274 est très brutal, car il est généré par des charges pyrotechniques. Comme il intervient après l'atterrissage, il y a donc un réel risque pour des personnes qui s'approcheraient du vaisseau (voir la vidéo 1, ci-dessous).

Fig. 2.7 : Schéma des antennes déployées après l'atterrissage.
Crédit : DR.

2.4. Enregistreur

Le système Rassviett dispose d'un enregistreur appelé Gnom-S, qui sauvegarde toutes les communications audio passées par l'équipage.

3. Le système Rassviett-M pour le Soyouz TMA

Sur les vaisseaux Soyouz TMA, le système Rassviett a été modernisé et s'appelle désormais Rassviett-M. On ne sait pas exactement en quoi consistent les améliorations, mais en analysant la photo de la figure 3.1 on s'aperçoit qu'il y a maintenant deux antennes ABM-272 à l'arrière du vaisseau.

Fig. 3.1 : Les antennes ABM-272 du vaisseau Soyouz TMA-15, 28 juillet 2009.
Crédit : NASA.

Lors de l'atterrissage de Soyouz TMA-1, le Compartiment de Descente s'est posé dans une position telle que l'antenne ABM-279 n'a pas pu se déployer complètement, ce qui a compliqué les opérations de sauvetage. De plus, l'équipage avait inhibé le déploiement des antennes arrières ABM-274 de peur que quelqu'un ne soit à côté du vaisseau et puisse être blessé, ce qui n'a pas arrangé les choses [4].

Après être sortis du vaisseau, et voyant que les équipes de récupération n'arrivaient pas, les cosmonautes ont installé une antenne HF additionnelle, appelée ABM-281, qui se fixe au niveau de l'écoutille. On ne sait pas si cette antenne existait déjà sur le premier système Rassviett des vaisseaux Soyouz TM, ou si c'est une amélioration du système Rassviett-M.

Fig. 3.2 : L'antenne additionnelle ABM-281 sur le vaisseau Soyouz TMA-1.
Crédit : Возвращение из космоса.

Cliquez ici si vous ne voyez pas la vidéo.

Vidéo 1 : Déploiement des antennes ABM-279 et ABM-274 du vaisseau Soyouz TMA-21.
Crédit : NASA TV.

Avec le système Rassviett-M, l'enregistreur Gnom-S est supprimé. Toutes les communications audio sont enregistrées en numérique sur l'enregistreur de vol SZI.

4. Le système Rassviett-3BM pour le Soyouz TMA-M

Les vaisseaux Soyouz TMA-M (11F732A47) et Soyouz MS (11F732A48) sont équipés du système modernisé Rassviett-3BM. Les principales améliorations sont :

- l'ajout d'une balise COSPAS-SARSAT appelée USB-12,
- la capacité de communiquer avec le sol via les satellites Loutch-5 par l'intermédiaire de l'EKTS-TKA.

Le système Rassviett-3BM équipe tous les vaisseaux Soyouz depuis Soyouz TMA-04M.

Fig. 4.1 : La balise USB-12.
Crédit : RKS.

Fournie par l'entreprise RKS, elle permet de transmettre en temps réel au Centre de Contrôle des Vols (TsUP) les coordonnées précises de l'atterrissage (GPS/GLONASS), et ainsi de faciliter la récupération de l'équipage. La transmission se fait sur la fréquence 406,037MHz. Le boîtier de l'USB-12 a une masse de seulement 1,9kg, et la précision est de 5 à 10m [3].

Fig. 4.2 : La balise USB-12.
MAKS-2015. Crédit : Nicolas PILLET.

On note que, lors du retour sur Terre de Soyouz TMA-14M, le 12 mars 2015, les communications audio ont été perdues pendant environ trente-cinq minutes suite à un dysfonctionnement.

Bibliographie

[1] SIDDIQI, A., Sputnik and the Soviet Space Challenge, p. 471
[2] GOUDILINE, V., Ракетно-космические системы (История. Развитие. Перспективы)
[3] KRASSILNIKOV, A., Novosti Kosmonavtiki n°07-2012
[4] CHAMSOUTDINOV, S. Novosti Kosmonavtiki n°07-2003
[5] Soyuz Crew Operations Manual, disponible sur le forum NasaSpaceFlight L2


Dernière mise à jour : 25 septembre 2016