Le vol de Vostok | Chronologie

Le 17ème lanceur Vostok (8K72 n°Е103-16) décolle du pas de tir n°5 (17P32-5) de la zone n°1 du cosmodrome de Baïkonour, le 12 avril 1961 à 06h06'59,7" GMT.

A 06h09 GMT les étages latéraux (Blocs BVGD) sont largués puis, à 06h10 GMT, c'est au tour de la coiffe. A 06h12 GMT le deuxième étage (Bloc A) se sépare à son tour. A 06h21 GMT le troisième étage (Bloc E) s'éteint et est largué 10" plus tard. Le vaisseau Vostok est sur orbite.

Le vol se déroule alors sans incident notable. Les manœuvres sont toutes automatisées et GAGARINE n'a rien d'autre à faire que surveiller leur bon déroulement. En cas de problème, il pourrait toujours utiliser les commandes manuelles, mais il a besoin pour cela d'un code à trois chiffres qu'il ne connait pas, et qui ne doit lui être communiqué qu'en cas d'avarie.

Cette mesure était censée prévenir tout risque d'action non-réfléchie de la part du cosmonaute, car on n'était pas sûr à l'époque que le milieu spatial n'altère la santé mentale. Mais les responsables craignant la possibilité d'une coupure des communications lors du vol, il avait été donné à GAGARINE une enveloppe scellée contenant le code. L'Histoire nous apprendra que le fameux code était 1-2-5.

Tout au long du vol, GAGARINE enregistre ses commentaires sur une bande magnétique. Aux alentours de 07h00 GMT, la nouvelle de l'événement est rendue publique.

A 07h25 GMT le TDU est mis à feu. Un incident survient alors : le module de service ne se sépare pas correctement, et en conséquence, le vaisseau n'atterrira pas à l'endroit prévu.

Jugeant le risque de sa situation tout à fait acceptable, GAGARINE transmet au sol que tout est normal. Alors qu'il commence à rentrer dans l'atmosphère, le vaisseau se met à tourner sur lui-même de plus en plus rapidement. GAGARINE entend un bruit au dehors, et ne sait pas s'il s'agit d'un problème avec le bouclier thermique. La rotation de Vostok est de plus en plus rapide car son centre de gravité est fortement déplacé. La situation devient de plus en plus grave.

Après 10 minutes, les câbles qui retenaient le module de service sont consumés et le module de descente retrouve un comportement nominal. A 7000m d'altitude l'écoutille située derrière la tête du cosmonaute est éjectée. Quelques secondes plus tard c'est au tour de GAGARINE. Il reconnait la zone, et observe sa capsule se poser sans encombre à quelques kilomètres. Puis il touche lui même terre, près d'une ferme du village de Smelovka, dans la région de Saratov. Il est 07h55 GMT. Le vol aura duré 1h48.

La kolkhozienne Anna TAKHTAROVA a été témoin de l'atterrissage et se dirige vers GAGARINE. Elle ne sait pas alors s'il s'agit d'un Américain éjecté d'un avion en détresse ou l'un des leurs. L'inscription « SSSR » sur son casque et le sourire sur son visage dissipent ces peurs, et le premier cosmonaute de l'Histoire est accueilli avec vigueur.

Très peu de temps après, un véhicule militaire arrive sur les lieux. A son bord se trouve le major d'artillerie GALIMOV. Un soldat est posté près du vaisseau tandis que GALIMOV emmène GAGARINE à la caserne toute proche. Ils y arrivent à 08h15 GMT, et c'est le major GASSIEV qui accueille le cosmonaute et le met en communication téléphonique avec le major-général d'aviation Youri VOVK.

A 08h20 GMT, GAGARINE rencontre le personnel de la caserne. Ensuite, il est reconduit en voiture jusqu'au site d'atterrissage; mais sur le chemin il aperçoit un hélicoptère militaire, qui provient justement du site d'atterrissage qu'il avait atteint quelques minutes plus tôt. GAGARINE descend du véhicule et fait signe.

L'hélicoptère Mi-4 se pose près de la voiture. A son bord se trouvent : le pilote S. KHITRINE, le lieutenant-général I. K. BROVKO (commandant de la garnison d'Enguels), le colonel S. OSSIPOV et le technicien GALKINE. Ils ramènent le cosmonaute sur les lieux de son atterrissage, car c'est ici qu'il est censé attendre. Mais il reçoit l'ordre de gagner la base d'Enguels, et le Mi-4 redécolle donc immédiatement.

Il arrive à Enguels à 08h50 GMT et GAGARINE est accueilli par le major-général EVGRAFOV. Il y reçoit les félicitations de Nikita KHROUCHTCHEV, avec qui il s'entretient par téléphone.

A 09h20 GMT, deux avions (un Il-18 et un An-10) en provenance de Baïkonour atterrissent sur la piste de la base d'Enguels. Parmi les personnes présentes à leur bord, on note le général d'aviation F. AGALTSOV et le commissaire de la Fédération Aéronautique Internationale Ivan BORISSIENKO. Celui-ci est chargé d'homologuer le record que vient de fixer GAGARINE.

A 12h25 GMT, le cosmonaute monte dans un Il-14 qui décolle pour Kouïbychev. Le lendemain du vol (le 13 avril), GAGARINE se repose beaucoup, et parle avec Hermann TITOV de ses impressions.

Il fait ensuite son rapport à la Commission d'Etat. Oleg IVANOVSKI est présent et se souviendra plus tard que « l'assemblée l'a écouté en retenant son souffle ». Ses dires sont immédiatement dactylographiés et la copie est estampillée « Très secret ». Elle ne sera rendue publique qu'en 1991, à l'occasion du trentième anniversaire du vol (voir annexe 2).

Le 9 mai 2001, elle est vendue aux enchères à New York pour 171.000$. Au mois de juin 2001, le conservateur du musée GAGARINE a demandé au Président POUTINE de la faire racheter.

Revenons en 1961. Plus tard dans la journée du 13 avril, trois journalistes sont autorisés à s'entretenir avec GAGARINE. Il s'agit de Nikolaï DENISSOV (Pravda), Gueorgui OSTROUMOV (Izvestia) et Vassili PESKOV (Komsomolskaïa Pravda). Le cosmonaute a reçu l'ordre de ne donner aucun détail sur le vaisseau ou sur le programme spatial soviétique. Il se contente donc de réponses floues et très générales.

Le 14 avril il est conduit en Il-18 à Moscou où l'attend un cortège d'officiels du Parti communiste. La ville lui a réservé la plus grande liesse depuis la victoire de 1945. Il atterrit à l'aéroport Vnoukovo et à sa descente d'avion doit franchir un immense tapis rouge sous les yeux de milliers de personnes.

Il est ensuite accueilli par sa famille et par Nikita KHROUCHTCHEV, et rejoint la Place Rouge debout dans une limousine décapotable. Là, il monte les marches du mausolée de Lénine d'où il lit un discours écrit par sa hiérarchie et faisant l'apologie du régime socialiste.